Emile Ajar : la plus grande supercherie littéraire

En 1974, l’écrivain à succès Romain Gary à perturbé le système littéraire français en se faisant passer pour quelqu’un d’autre.

Vous avez certainement entendu parler du célèbre écrivain Romain Gary, lauréat du prix Goncourt de 1956 avec son livre Les Racines du Ciel. Mais saviez-vous qu’il était également connu sous le nom d’Emile Ajar, gagnant du même prix en 1975 avec La vie devant soi ? La double identité de cet écrivain à succès a laissé place à l’un des plus grands canulars de la littérature française. Mais pourquoi avoir créé ce double personnage ? Et dans quel(s) but(s) ?

En 1974, Romain Gary arrive au tournant de sa carrière et ressent un besoin de renouveau. Il souhaite s’écarter de l’image médiatique dont il est victime en se replongeant véritablement dans l’écriture de ses livres et ainsi, retrouver les prémices de sa plume. Il lui vient ainsi l’idée de publier ses romans sous un nouveau pseudonyme : Emile Ajar.

Pas de quoi en faire tout un buzz me direz-vous, jusqu’à ce jour où 1 an plus tard, le fameux Emile Ajar gagne le prix Goncourt de 1975. Le problème étant qu’il est interdit pour une même personne de gagner 2 fois ce prix. Toutes les chaînes de médias réclament alors cet écrivain au visage inconnu, ayant toujours refusé les interviews médiatiques. Il devient un écrivain mystère qui fascine le public. Mais Paul Pavlowitch, le petit cousin de Romain Gary, se fera passer pour Emile Ajar et répondra aux invitations des chaînes d’informations. Quant à Romain Gary, il maintient ses apparitions médiatiques sous sa vraie identité, en affirmant même dans une interview qu’il « est quasiment impossible de cacher quelque chose aux parisiens ». Au même moment, le premier roman signé Emile Ajar est déjà dans les librairies. 

Carlos De Sousa. « Menteurs compulsifs : comment les reconnaître ». https://www.ledauphine.com/magazine-sante/2022/01/30/etes-vous-un-menteur-compulsif-sans-le-savoir

Le 2 décembre 1980, Romain Gary se donne la mort à l’âge de 66 ans. Il emporte avec lui Emile Ajar et tout est révélé. Son neveu témoigne de l’escroquerie de son oncle en décrivant les coulisses de la supercherie, la névrose et le trouble identitaire de Romain Gary. On découvre alors ce qui se cachait réellement derrière cette double signature qui n’était pas juste une blague ou un simple défi. Mais une douleur bien plus profonde et occulte. 

Cette histoire nous interroge sur de nombreux aspects comme la réelle reconnaissance d’un artiste et de son œuvre : personne n’a reconnu le style d’écriture de Gary, pourtant très célèbre. Nous pouvons aussi nous demander quelles peuvent être les origines de cette crise identitaire. Paul Pavlowitch a fait quant à lui un lien avec la mère de l’auteur en expliquant que Gary a passé sa vie à réaliser les rêves de sa mère. Et que son alter-auteur s’est créé quand il avait 60 ans, l‘âge auquel sa mère est décédée. Peut-on alors en déduire que sa véritable personnalité se retrouve en Emile Ajar et non en Romain Gary ? Qui de ses deux identités est la plus authentique, la plus sincère ? Cet événement littéraire posera un grand nombre de questions et d’exclamations sur la question identitaire, la reconnaissance et la manière de mener sa vie.

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